Consultation du CSE. La BDES négociable et numérique

Avec la mise en place du CSE, la relation sociale dans l’entreprise évolue. Désormais, si l’existence de la base de données dite « unique » ou BDES est toujours obligatoire dans les entreprises d’au moins 50 salariés, plusieurs nouveautés sont à relever. Le contenu et la mise à disposition sont négociables ; le bilan social et sa mise à disposition sous format numérique sont imposés pour les employeurs de 300 salariés et plus. 

bdes_information_consultation du CSELa base de données économiques et sociales, appelée BDES ou base de données unique, BDU, permet à l’employeur de mettre à disposition des représentants du personnel les données nécessaires pour qu’ils puissent donner un avis à l’occasion des trois consultations récurrentes du CSE, le comité social et économique.
Après les ordonnances Macron du 22 septembre 2017, le décret du 29 décembre est venu préciser que la base devait donner « une vision claire et globale de la formation et de la répartition de la valeur créée par l’activité de l’entreprise ».

Le bilan social intégral dans le contenu de la BDES

L’article R. 2312-7 du décret précise dans un tableau récapitulatif le contenu supplétif (à défaut d’accord) de la BDES tel qu’il doit l’être. Il doit désormais être plus consistant pour toutes les entreprises, quelle que soit leur taille.

La nouveauté est que la base de données des entreprises d’au moins 300 salariés devra comporter presque l’intégralité du contenu du bilan social.

L’article L.2312-21 du code du travail détaille ce que l’accord d’entreprise doit définir :

  • l’organisation, l’architecture et le contenu de la BDES ;
  • les modalités de fonctionnement, en particulier les droits d’accès et le niveau de mise en place dans les entreprises comportant des établissements distincts ;
  • le support et les modalités de consultation et d’utilisation de la BDES.

Selon la loi, la base de données doit comporter au moins : « l’investissement social, l’investissement matériel et immatériel, l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes au sein de l’entreprise, les fonds propres, l’endettement, l’ensemble des éléments de la rémunération des salariés et dirigeants, les activités sociales et culturelles, la rémunération des financeurs et les flux financiers à destination de l’entreprise. »

L’accord d’entreprise concernant la BDES peut également prévoir d’intégrer dans la base, les informations nécessaires aux négociations obligatoires et aux consultations ponctuelles du comité social et économique.

En l’absence d’accord, les informations figurant dans la base de données portent sur l’année en cours, sur les deux années précédentes et sur les prévisions des trois années suivantes, comme précédemment pour la BDES avant les ordonnances.

Si aucun accord n’est conclu dans les entreprises de moins de 300 salariés, « un accord de branche peut définir l’organisation, l’architecture, le contenu et les modalités de fonctionnement de la base de données économiques et sociales » précise le code du travail.

Support numérique pour la BDES des entreprises d’au moins 300 salariés

Le décret du 29 décembre 2017 mentionne par ailleurs, pour les entreprises de 300 salariés et  plus, que la base de données doit pouvoir être consultée par les personnes concernées* sur un support informatique. Pour les entreprises de moins de 300 salariés, il s’agira soit d’un support informatique, soit d’un support papier.

Délais et contenu de la BDES et… jurisprudence 

De récents cas de jurisprudence ont attiré l’attention car ils déterminent les pratiques à éviter ou sur lesquelles mieux vaut être vigilants.

Ainsi, il ressort de ces cas que si les informations fournies par l’employeur sont considérées comme étant insuffisantes par les représentants du personnel pour pouvoir rendre un avis, les élus du CSE peuvent saisir le président du tribunal de grande instance (TGI) pour ordonner à la direction de l’entreprise, en référé, de communiquer les données manquantes.

Dans le cas en question, qui concernait l’UES Markem Imaje, l’employeur avait pourtant organisé plusieurs réunions sur les orientations stratégiques de l’entreprise et mentionné un projet de réorganisation du service comptabilité. Cependant, les informations fournies n’étaient pas incluses dans la BDES et étaient trop pauvres pour permettre au CSE de s’exprimer.

Pas de limite pour saisir le TGI

Le même comité social et économique avait attendu quatre mois après la communication des données par l’employeur avant de saisir le tribunal. Ce délai n’a finalement pas été retenu comme argument contre le comité par la cour de cassation puisque le CSE considérait que la BDES ne comportait pas suffisamment d’informations. La BDES n’ayant pas été mise à disposition par l’employeur, alors qu’il en a l’obligation (article L2373-7-2 du code du travail), le délai de consultation ne pouvait pas courir. Le cas a ainsi été renvoyé à la cour d’appel le 28 mars 2018.

D’autres cas récents (suspension d’une cession pour Free, suspension d’un PSE pour Coca Coal) ont montré qu’une BDES mal renseignée ou non disponible pouvait avoir des conséquences très importantes pour la mise en place de projets par l’entreprise.

 

Philippine Arnal-Roux

 

*les membres de la délégation du personnel du comité social et économique, les membres de la délégation du personnel du comité social et économique central d’entreprise et les délégués syndicaux.