L’exercice du droit de retrait : comment fonctionne-t-il ?

Les fortes chaleurs, type canicule, peuvent aboutir à un droit de retrait du salarié si l’employeur ne prend pas les mesures nécessaires pour préserver sa santé et sa sécurité. En quoi consiste le droit de retrait du salarié et quel est le rôle des représentants du personnel ?

La situation de travail peut présenter une menace pour la vie ou la santé des salariés. Dans ces conditions, le salarié dispose de la faculté de se retirer de cette situation en interrompant ses activités tant que l’employeur n’a pas pris les mesures nécessaires pour faire cesser le danger.

 

Qu’est-ce que le droit de retrait ?

droit de retrait entreprise

Le droit de retrait peut être exercé par un salarié qui se sent en danger à son poste de travail. Dans ce cas, il choisit de quitter son poste. Photo : Unsplash

Le droit de retrait est déterminé par les articles L. 4131-1 à L. 4132-5 du code du travail qui précise que tout salarié peut se retirer en délaissant ses fonctions à la condition d’avoir un motif raisonnable de penser que sa situation de travail présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé.

 

  • Condition n°1 : un danger grave et imminent

Un danger peut résulter d’une cause extérieure au salarié (défectuosité des machines, fortes chaleurs) comme interne au salarié en étant lié à son état de santé (risque d’allergie lié au poste de travail).

La gravité du danger est celle qui est susceptible de provoquer un accident du travail ou une maladie professionnelle entraînant la mort ou une incapacité permanente ou temporaire.

Quant à l’imminence du danger, elle est celle qui se réalise soudainement.

 

  • Condition n°2 : un motif raisonnable

Le motif raisonnable est une crainte du salarié pour sa vie ou sa santé, l’apparence et la bonne foi de l’individu suffisent.

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A quelles situations correspond le droit de retrait ? 

Absence de conformité du matériel, locaux non chauffés, défaut de protection concernant les équipements, risque d’agression, etc. Le droit de retrait peut correspondre à de nombreuses situations, par exemple :

  • des propos sexistes et des humiliations relatés au médecin du travail, corroborés par des attestations produites par les membres du CHSCT ou maintenant, du CSE (Cass. soc. 17 février 2016, n°14-22097 et n°14-26145) ;
  • une agression par des usagers dont ont été victimes ses collègues de travail (Cass. soc. 19 mai 2010, n°09-40353) ;
  • le refus d’un conducteur de poids lourds d’effectuer un nouveau transport de marchandise en raison de l’amplitude de la journée de travail précédente (Cass. soc. 2 mars 2010, n°08-45086) ;
  • une défectuosité affectant le système de de freinage d’un véhicule (Cass. 10 janvier 2001, n°99-40294) ;
  • un camion qui a fait l’objet d’une interdiction de circuler de la part du service des mines (Cass. soc. 5 juillet 2000, n°98-43481) ;
  • un poste de travail nécessitant le contact avec les animaux et des produits chimiques présentant des risques graves d’allergie pour le salarié (Cass. soc. 20 mars 1996, n°93-40111) ;
  • un défaut persistant de la conformité des machines de production et des installations électriques avec les normes de sécurité (Cass. soc. 1er mars 1995, n°91-43406).

 

Quelle est la procédure du droit de retrait ?

Le salarié, qui présente son droit de retrait à l’employeur doit respecter un certain formalisme.

A ce titre, le règlement intérieur peut contenir une clause prévoyant les modalités pratiques du droit de retrait, mais sans imposer d’écrit de la part du salarié (conseil d’Etat 12 juin 1987, n°72388, 74605 et 75276). Un représentant du personnel peut également être informé de ce droit de retrait et, dans ce cas, exercer son droit d’alerte.

Il convient de souligner que le salarié, qui a exercé son droit de retrait, ne peut être invité par l’employeur à reprendre son poste de travail si le danger grave et imminent persiste. Dans ces conditions, l’employeur doit lui maintenir son salaire (article L. 4131-3 du code du travail).

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Quel rôle jouent les représentants du personnel ?

Les représentants du personnel jouent un rôle important grâce à leur droit d’alerte (article L. 4131-2 du code du travail), mais également en veillant au respect du droit de retrait du salarié par l’employeur.

  • Comment les IRP exercent-t-ils leur droit d’alerte ?

En effet, au constat d’une situation de travail présentant un danger grave et imminent pour les salariés, les représentants du personnel peuvent alerter l’employeur en utilisant leur droit d’alerte. Ensuite, une enquête est réalisée conjointement avec l’employeur afin de déterminer le danger grave et imminent et de le faire cesser. Enfin, un écrit est consigné sur la situation dans un registre spécial (articles L. 4132-2, D. 4132-1 et D. 4132-2 du code du travail).

 

  • Le droit de retrait et les représentants du personnel

Il appartient au salarié qui souhaite exercer son droit de retrait de se rapprocher des représentants du personnel, du CSE ou de la commission santé, sécurité et conditions de travail. Leur rôle est de veiller à la conformité de l’utilisation de ce droit au regard du contexte.

 

Un salarié peut-il être sanctionné en exerçant son droit de retrait ?

Non ! Aucune sanction, encore moins un licenciement, ne peut venir affecter l’exercice du droit de retrait du salarié (article L. 4131-3 du Code du travail). Il a même été jugé qu’un licenciement, prononcé pour l’exercice légitime du droit de retrait, est nul (Cass. soc. 28 janvier 2009, n°07-44556).

C’est seulement si l’exercice de ce droit cause un dommage que le salarié pourra être sanctionné sur le plan disciplinaire, mais également au plan pénal.

 

Virginie Morgand