La cour d’appel de Versailles a condamné un employeur à verser près de 180 000 euros à un représentant du personnel dont le déroulement de carrière a été entravé.

L’employeur doit apporter la preuve qu’il n’a pas discriminé un salarié. Photo : Unsplash
Nul ne peut être sanctionné, licencié ou moins bien traité, notamment en matière d’embauche, de rémunération, de formation, de promotion ou encore de classification, en raison de son engagement syndical. Ce principe fondamental (qui s’applique aussi en matière de discrimination liée à l’âge, au sexe, à l’état de santé, à l’origine réelle ou supposée, aux opinions politiques, etc.) doit être pleinement appliqué par les entreprises, au risque de devoir payer au salarié discriminé de conséquentes réparations.
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Déroulement d’une carrière discriminatoire
C’est ce que vient de rappeler la cour d’appel de Versailles dans un arrêt du 19 décembre 2019, qui a condamné une entreprise à verser 179 000 euros au titre du préjudice financier subi par un représentant du personnel dont le déroulement de carrière a été jugé discriminatoire.
Dans cette affaire, le salarié avait comparé sa situation avec un panel de 28 autres salariés embauchés au même niveau de classification que lui. Ce comparatif montrait que, depuis 2006, date du début de son engagement syndical, son évolution avait été « nettement moins favorable » que celle de ses collègues, situation à laquelle l’employeur n’avait pu apporter de justification objective.
L’absence de discrimination syndicale doit être prouvée par l’employeur |
En matière de discrimination, le salarié ou candidat à un emploi qui s’estime discriminé doit présenter au juge civil « des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination ». L’employeur doit ensuite « prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ». Au regard de ces éléments, « le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles » (article L1134-1 du code du travail). Le juge peut ainsi ordonner à l’employeur de communiquer des éléments, y compris nominaux, tels que la rémunération, la date d’embauche, l’évolution de carrière, etc. Ces éléments permettrons de comparer la situation du salarié avec celle d’autres salariés de sa catégorie. |
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Un rappel de salaire sur 12 années
La discrimination étant établie, les juges ont décidé de repositionner le salarié à des niveaux de classification plus élevés, et de réévaluer son salaire en conséquence, sur une période de 12 ans (de 2006 à 2018). Le rappel de salaire que l’employeur est tenu de lui verser inclut les parts fixes et variables de la rémunération du salarié, la moyenne des augmentations individuelles et collectives perçues par les salariés de sa catégorie à compter d’août 2018, le rehaussement des primes de participation et d’intéressement, le préjudice pour la retraite.
Ce jugement démontre l’importance de mettre en place, dans l’entreprise, des mesures efficaces de lutte contre les discriminations, qu’elles soient liées à l’engagement syndical ou à tout autre critère listé par l’article L1132-1 du code du travail.
Élodie Sarfati
À savoir égal
Agence de digital learning en social-RH
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