Modulation du temps de travail, imposition de jours de congés, activité partielle, formation… Ces dernières semaines, les entreprises et les branches professionnelles ont conclu dans l’urgence des accords collectifs leur permettant d’aménager l’organisation du travail pour absorber et limiter l’impact du coronavirus. Tour d’horizon des principaux thèmes abordés par ces accords.
Près de 10 millions de salariés sont aujourd’hui en activité partielle. Ce dispositif en grande partie financé par l’État permet aux entreprises de verser une indemnité aux salariés concernés. Pour celles qui déploient le dispositif, certains accords vont au-delà de l’indemnisation légale, fixée à 84 % de la rémunération nette. Chez Renault Trucks par exemple la garantie de rémunération est de 92 % pour les cadres comme pour les non-cadres. Chez Daher, elle est de 95 % du net, plafonné à 4,5 smic. En contrepartie et pour compenser les heures non réalisées, l’entreprise demande aux salariés concernés par l’activité partielle de travailler plus, une fois la période de confinement levée : 25 heures d’activité supplémentaires pour les non-cadres, trois jours pour les cadres à réaliser avant le 31 décembre 2020.

La plupart des accords d’entreprise imposent des congés payés pour retarder au maximum le recours au chômage partiel. Photo : Unsplash
D’autres entreprises vont jusqu’à verser 100 % de la rémunération nette, comme Renault, PSA ou encore la Maif. Une disposition généralement financée par un fonds de solidarité. Chez Renault, celui-ci est alimenté par les jours de réduction du temps de travail (RTT) et les congés payés (CP) des salariés. Même constat chez PSA : les cadres apportent deux jours de CP par mois, alors que les ouvriers, les techniciens et les agents de maîtrise participent à hauteur d’un jour de congés payés par mois. Par ailleurs, l’entreprise abonde le fonds de solidarité.
Chez Safran, un fonds de solidarité a également été mis en place. Les salariés au forfait-jour, placés en activité partielle et relevant de la convention collective de la métallurgie se verront prélever un jour de congé pour alimenter le fond de solidarité. En effet, en cas d’activité partielle, ces salariés bénéficient normalement de l’intégralité de leur rémunération nette comme le prévoit la convention collective nationale. Il s’agit ainsi d’améliorer l’indemnisation des autres salariés de l’entreprise, placés en activité partielle. L’accord de Safran prévoit également que le fond de solidarité soit alimenté par des dons de RTT, congés d’ancienneté ou encore reliquat de congés payés sur la base du volontariat.
Accords collectifs : des délais réduits |
Tous les accords liés à l’état d’urgence sanitaire sont à durée limité, qu’ils soient de branche ou d’entreprise. Ils ne peuvent s’appliquer au-delà du 31 décembre 2020. Dans une ordonnance du 15 avril, le gouvernement a réduit les délais en matière d’accords collectifs liés à la pandémie et conclus jusqu’au 24 juin 2020.
Sont réduits à 8 jours :
Sont réduits à 5 jours :
|
_______________
Consulter les offres de formation Négociation d’accord d’entreprise
_________________
2/ Congés payés, jours de repos et congés solidaires
La plupart des accords d’entreprise recourent aux dispositions prévues par l’ordonnance du 25 mars sur l’imposition ou la modification des jours de congés payés en améliorant parfois la règle. L’ordonnance prévoit en effet que, sous couvert d’un accord collectif, l’employeur puisse imposer ou modifier les congés payés des salariés dans la limite de six jours ouvrables et en respectant un délai de prévenance d’un jour franc (24h). En revanche, l’accord collectif n’est pas nécessaire pour imposer ou modifier les jours de RTT et les jours de congés conventionnels pour ceux inscrits sur un compte épargne temps.
Dans certains des accords conclus, les partenaires sociaux négocient avant tout pour reculer la mise en activité partielle des salariés.
C’est le cas par exemple chez Société Générale ou encore chez Danone. L’industriel « n’envisage pas de recourir aux mesures d’activité partielle tant que d’autres dispositifs peuvent permettre de gérer le ralentissement d’activité de certaines fonctions. » Ainsi l’accord prévoit l’utilisation des compteurs temps avec un maximum de 15 jours ouvrés jusqu’au 31 mai 2020. L’employeur pourra ainsi imposer jusqu’à cinq jours de CP ouvrés avec un délai de prévenance de cinq jours. Les salariés devront prioritairement programmer ou maintenir leurs congés durant la période de confinement.
Société Générale de son côté, demande aux salariés de prendre deux semaines de repos sur la période du 16 au 30 mai en mixant cinq jours de congés payés puis cinq jours ouvrés de RTT. Si le salarié ne dispose pas d’assez de jours, il devra utiliser son compte CET.
La Matmut a signé pour sa part un accord plutôt original. En effet, la mutuelle s’est entendue avec ses partenaires sociaux pour proposer aux salariés de donner des jours de congés payés, congés conventionnels ou issus de leur CET au profit de trois fondations : la fondation d’urgence de la fondation de France, la fondation Abbé Pierre et la Fondation des Femmes. Les salariés peuvent notamment renoncer jusqu’à six jours de congés au plus tard avant le 3 mai prochain. En contrepartie, l’entreprise versera 20 euros par jour donné aux associations ciblées par le salarié.
________________
Consulter les offres de formation Démarche QVT
________________
3 – Télétravail et confinement
La question du télétravail apparaît également dans certains accords de branche ou d’entreprise. Dans le secteur du courtage d’assurances, l’accord souligne ainsi que le télétravail doit être privilégié dans les entreprises de la branche quand la nature du poste le permet.
La Matmut revient également sur le sujet, notamment concernant les surcoûts que peut entraîner un télétravail à temps plein. L’accord prévoit par exemple, pour chaque jour connecté et télétravaillé, des forfaits pour « compenser » l’utilisation d’une connexion internet personnelle ou d’un forfait téléphone habituellement financé par le salarié.
4 – Formation à distance
Enfin, certaines entreprises veulent profiter de la période pour former leurs troupes dont l’activité est en berne et l’écrivent dans l’accord collectif. Chez Renault, l’offre de formation digitale a ainsi été renforcée. De la même manière chez Danone, les salariés peuvent suivre des « activités alternatives pendant la durée du confinement ». Il s’agit notamment de formations e-learning autour des métiers, mais aussi de la qualité de vie au travail, de la diversité et de formations obligatoires accessibles à distance.
Anne-Cécile Geoffroy
A savoir égal
Agence de digital learning en social-RH
Autres articles dans la même catégorie :
-
Forfait-jours. Les modalités du contrôle du temps de travail doivent être précisées
-
Indemnité d'activité partielle. Le taux de 70 % est maintenu
-
Titres-restaurant. Les dérogations prolongées jusqu’au 28 février 2022
-
L'e-dialogue social ou comment les partenaires sociaux se sont adaptés
-
Port du voile en entreprise. L'importance de la clause de neutralité dans le règlement intérieur
-
Peut-on encore licencier un salarié non vacciné ?
-
Une annexe déontologique est tout aussi opposable que le règlement intérieur
-
Déficit de l’entreprise. Le CSE est en droit de déclencher un droit d’alerte économique
-
Licenciement abusif. La preuve issue d’une vidéo n’est pas recevable
-
La Pro-A, un outil pour former et fidéliser les salariés