Ces derniers mois, la cour de cassation a rendu plusieurs arrêts relatifs aux délais de consultation du CSE, statuant dans plusieurs affaires sur leur prolongation. Cette jurisprudence doit inciter l’employeur à être très vigilant sur la qualité des informations qu’il communique aux représentants du personnel.
Qu’il s’agisse d’une consultation récurrente ou ponctuelle, le CSE doit rendre son avis dans un délai fixé à l’avance, qui s’impose à lui. Ce délai démarre à partir du moment où toutes les informations nécessaires ont été remises aux élus CSE pour qu’ils puissent se prononcer valablement.

Plusieurs cas de jurisprudence récents incitent les employeurs à veiller à la qualité des informations transmises au CSE en vue d’une consultation. Photo : Unsplash.
Il commence donc à courir :
- Pour une consultation récurrente : lorsque l’employeur met à jour la BDES et en informe les élus. Aucun délai ne peut commencer à courir en l’absence de BDES (arrêt de la cour de cassation du 28 mars 2018).
- Pour une consultation ponctuelle : lorsque l’employeur communique aux élus les informations « précises et écrites » leur permettant « d’apprécier l’importance de l’opération envisagée ».
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Le juge peut étendre le délai même après son expiration
En cas de litige sur la qualité de l’information, les élus peuvent saisir le tribunal judiciaire (ex-TGI) en référé. Si le juge estime que l’information communiquée est effectivement insuffisante, il peut ordonner non seulement la remise de documents complémentaires, mais aussi la prolongation du délai initialement prévu.
Cependant, la saisine du tribunal ne suspend pas le délai, qui continue donc à courir en attendant que le juge statue.
Dès lors que se passe-t-il si celui-ci rend sa décision après la date d’expiration prévue ? Cette question a fait l’objet d’un arrêt de la cour de cassation le 26 février 2020. Celle-ci a estimé que la remise d’informations supplémentaires et la prolongation du délai pouvaient être accordées, même si le jugement était rendu après son expiration, « peu importait que l’employeur ait commencé à mettre en œuvre le projet ».
Compte tenu de la durée des procédures judiciaires, cette décision peut être lourde de conséquences pour l’entreprise. C’est ainsi que dans le litige à l’origine de cet arrêt, le CCE d’EDF, consulté sur le projet de cession de deux EPR au Royaume-Uni (le projet Hinkley Point), avait saisi le tribunal en référé le 20 juin 2016, alors que la procédure devait s’achever le 2 juillet. Le TGI avait rendu son jugement au mois d’octobre suivant et débouté les élus au motif que le délai avait expiré au moment où il statuait. Raisonnement que n’avait pas suivi la cour d’appel de Paris qui, constatant l’insuffisance d’information, avait ordonné à l’employeur de communiquer de nouveaux documents et de convoquer une nouvelle réunion du CCE en vue de sa consultation dans un délai de deux mois. Cette décision, rendue en septembre 2018, soit deux ans après la clôture des débats au CCE, a été confirmée par la cour de cassation.
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Pas de prolongation si le juge est saisi après la date butoir |
Pour obtenir la prolongation du délai de consultation, les élus doivent saisir le tribunal avant son expiration. À défaut, leur demande sera irrecevable. C’est ce qui ressort notamment d’un arrêt de la cour de cassation du 27 mai 2020 statuant sur un cas où les élus d’un comité d’établissement d’Auchan avaient saisi le juge des référés le 5 octobre 2017, alors que la consultation (sur l’ouverture du magasin le dimanche), s’était achevée trois mois plus tôt. |
La question des délais peut également faire l’objet d’une négociation. Ce cas de figure est même encouragé par le code du travail qui prévoit que ceux-ci sont fixés par accord d’entreprise, et seulement à défaut par le code du travail (dispositions supplétives).
En l’absence d’accord, le délai imparti est fixé à :
- Un mois ;
- Deux mois en cas d’intervention d’un expert ;
- Trois mois pour les consultations faisant intervenir les CSE d’établissement et le CSE central, avec recours à l’expertise (article 52312-6 du code du travail).
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Consultation du CSE. L’extension des délais est possible d’un commun accord
L’accord doit être conclu avec les délégués syndicaux (il peut s’agir d’un accord général portant sur le fonctionnement du CSE ou un accord de méthode) ou, s’il n’y en a pas dans l’entreprise, avec la majorité des titulaires du CSE. Mais la cour de cassation a également admis que l’accord de l’employeur pouvait résulter de son propre comportement !
Dans l’affaire jugée, l’employeur avait consulté les représentants du personnel sur la situation économique et financière de l’entreprise. En octobre 2016, une première réunion avait donné lieu à la nomination d’un expert par les élus.
À la suite d’échanges avec les élus et l’expert, l’employeur avait abondé la BDES le 23 janvier 2017, provoqué une réunion extraordinaire pour discuter du coût et de périmètre de l’expertise le 16 février et enfin fixé conjointement avec le secrétaire une réunion le 27 avril pour la restitution des travaux de l’expert et la remise des avis de l’instance. Puis il avait contesté le coût de l’expertise, arguant du fait que l’expert avait remis son rapport hors des délais légaux. Sans succès : dans l’arrêt rendu le 8 juillet dernier, la cour de cassation a estimé que l’employeur avait accepté de facto un rendu d’avis en avril, plus de deux mois après la remise des informations dans la BDES, en janvier, point de départ du délai.
Les délais de consultation peuvent donc être prolongés d’un commun accord, même implicite et informel.
Élodie Sarfati
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