Depuis le 15 novembre 2020, le délai de carence ne s’applique plus et ce jusqu’au 31 décembre 2020. Cette décision vient quelques jours après plusieurs études démontrant que la prise en charge par l’État des jours de carence pouvait permettre de freiner la propagation du virus Covid-19 et coûterait largement moins qu’un retour au confinement généralisé.

La suppression du délai de carence permettrait de freiner l’épidémie et coûterait moins cher qu’un confinement généralisé. Photo : Unsplash
Le 28 octobre, alors qu’Emmanuel Macron annonçait le reconfinement du pays, les économistes Thomas Breda et Léa Toulemon publiaient le même jour une tribune dans Le Monde, dans laquelle ils appelaient le gouvernement à indemniser les jours de carence. L’objectif ? Inciter les gens à rester chez eux au moindre symptôme afin d’endiguer la propagation de la pandémie et… éviter le drame d’un reconfinement.
« Je ne suis pas opposé à l’idée d’un reconfinement à l’heure actuelle, précise tout de suite Thomas Breda. Je regrette simplement que l’on n’ait pas pris cette mesure de bon sens plus tôt ».
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Délai de carence ou pas, le nombre de jours en arrêt maladie reste le même
Plusieurs études montrent en effet que lorsque les jours de carence sont pris en charge, le nombre total de jours d’arrêt maladie effectués dans l’année n’augmente pas. Ce qui change en revanche, c’est la manière de les prendre. Ainsi, lorsque les jours de carence sont indemnisés, les salariés prennent plus de petits séjours. À l’inverse, lorsque les jours de carence ne sont pas couverts, les arrêts sont plus longs, de manière à « rentabiliser » la perte de revenus.
Ainsi, « le gain pour les finances publiques est limité », affirment les économistes. Autrement plus problématique, d’autres recherches montrent en revanche que le délai de carence incite les salariés à continuer à travailler même lorsqu’ils ont des symptômes. En temps de pandémie, un tel raisonnement peut être catastrophique dans la mesure où ces employés peuvent contaminer leurs collègues.
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Une mesure bien moins coûteuse qu’un reconfinement
Par ailleurs, le coût pour l’État serait bien moins élevé qu’un reconfinement. Près de 20 milliards ont été dépensés lors du premier reconfinement, rappellent les auteurs de la tribune.
En comparaison, la suppression des jours de carence équivaudrait à environ 200 millions d’euros par an pour le public et près du triple dans le privé, soit 750 millions par an au maximum.
Une posture idéologique plutôt qu’économique
Mais alors pourquoi avoir refusé de mettre en place une telle mesure ? Pour Thomas Breda et Léa Toulemon, il s’agit davantage d’une posture idéologique. « La seule explication semble être la croyance ancrée mais en l’occurrence non avérée qu’on ne peut pas faire confiance aux citoyens pour être responsables et agir dans l’intérêt général », écrivent-ils dans Le Monde.
Le gouvernement avait pourtant suspendu les jours de carence, dans le privé comme dans le public, au cours du premier confinement. Ils ont cependant été rétablis en juillet. « On ne comprends pas », soupire Thomas Breda.
Les pouvoirs publics craignent-ils une explosion des arrêts maladie non justifiés pendant la pandémie ? « C’est possible, reconnaît-il. Mais il faut néanmoins rappeler qu’un arrêt maladie intervient sur la base d’un arrêt de travail signé par un médecin. Il faut donc leur faire confiance ».
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Une mesure indispensable pour les travailleurs essentiels
Les auteurs de la tribune rappellent par ailleurs que cette mesure reste pertinente même lors du confinement pour les travailleurs essentiels.
« Prenez par exemple un employé de chez Amazon, probablement rémunéré au smic, qui empaquette les colis. S’il tombe malade, il va peut-être vouloir continuer à travailler. Or s’il est positif au Covid-19, il va toucher plusieurs dizaines de cartons par jour qui seront ensuite livrés à travers toute la France, ça pose question », souligne Thomas Breda.
Le décret paru le 15 novembre y répond avec la re-prise en charge du délai de carence.
Lou-Eve Popper
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