Dialogue social, égalité professionnelle, temps de travail, rupture conventionnelle… La loi de transformation de la fonction publique revoit de nombreuses règles en matière de ressources humaines, s’inspirant du droit social privé pour certaines d’entre elles. Nous vous proposons un tour d’horizon des dispositions déjà entrées en vigueur et de celles qui devront s’appliquer dans les prochains mois.

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Avec sa centaine d’articles, la loi du 6 août 2019 balaye large et rénove en profondeur les dispositions sociales dans la fonction publique. Elle touche en effet à de nombreux domaines RH :
- Le dialogue social, avec la refonte des IRP et de nouvelles règles pour la négociation ;
- La gestion des emplois avec en particulier le recours élargi aux contractuels ;
- La mobilité des agents, avec, notamment, la création d’une rupture conventionnelle pour les fonctionnaires ;
- L’égalité professionnelle, avec l’obligation pour les employeurs d’établir un plan d’action pluriannuel.
L’un des volets majeurs de la loi concerne le dialogue social. Il comporte deux grandes innovations : l’extension de la négociation collective et la fusion des instances représentatives du personnel.
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Une quinzaine de thèmes d’accord collectif avec application obligatoire
La première concerne la négociation collective. L’objectif de la loi est d’encourager la conclusion d’accords collectifs à tous les niveaux de la fonction publique, et de développer le dialogue social de proximité. Jusqu’à présent, la pratique était peu développée, pour la bonne raison que ces accords n’avaient pas de portée juridique permettant de les opposer aux parties.
L’ordonnance parue le 17 février 2021 fait sauter ce verrou et liste une quinzaine de thèmes de négociation pouvant faire l’objet d’un accord collectif avec force obligatoire, à tous les niveaux de la fonction publique (national et local). On y trouve par exemple le pouvoir d’achat, l’accompagnement social des réorganisations, les conditions de travail, la protection sociale complémentaire, la formation professionnelle… Pour être applicables, ils doivent être signés par une ou des organisations syndicales majoritaires.
La fusion des IRP
La seconde innovation concerne les instances représentatives du personnel. Reprenant la logique des ordonnances Travail de 2017 pour le secteur privé, la loi acte la fusion des comités techniques et des CHSCT pour créer une instance unique, le comité social. Ces nouvelles instances ne seront mises en place qu’à l’issue du prochain cycle électoral, fin 2022. À partir de cette date, l’ensemble des attributions des CT et des CHSCT seront transférées aux comités sociaux d’administration (fonction publique d’Etat), comités sociaux territoriaux (fonction publique territoriale) et comités sociaux d’établissement (fonction publique hospitalière).
Les comités sociaux auront accès à une formation spécialisée sur les questions de santé, sécurité et conditions de travail (FSSCT), mais seulement si l’administration comprend plus de 200 agents (ou en-deçà de ce seuil si des risques particuliers le justifient).
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Pour informer les membres des comités sociaux, les employeurs devront constituer d’ici à la fin 2022 une base de données sociales (BDS). Le décret du 30 novembre 2020 en a précisé le contenu et les modalités. Celle-ci devra être dématérialisée et comprendre les informations, actualisées chaque année et non nominatives, relatives à l’emploi, aux recrutements, aux parcours professionnels, à la formation, aux rémunérations, à la santé-sécurité, à l’organisation et aux conditions de travail, à la protection sociale, au dialogue social et à la discipline. Le rapport social unique est quant à lui en vigueur depuis janvier 2021. Il remplace les bilans et rapports sociaux existant jusque-là et devra, au plus tard à la fin 2022, être alimenté par les données de la BDS. D’ici là, il est présenté aux comités techniques à partir des données disponibles. |
Des CAP recentrées
Autres instances remaniées par la réforme : les commissions administratives paritaires (CAP). La loi a réduit progressivement leurs attributions. Depuis le 1er janvier 2020, elles ne sont plus consultées sur les demandes de mobilité, y compris les mutations, et depuis le 1er janvier 2021, elles ont perdu leurs compétences en matière d’avancement et de promotion. Les CAP sont ainsi recentrées sur l’examen des décisions défavorables aux agents : discipline, refus de titularisation, refus de temps partiel, licenciement, etc.
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Expérimentation de la rupture conventionnelle
En matière de mobilité, la mesure la plus symbolique concerne sans doute l’expérimentation, depuis 2020 et jusqu’en 2025, de la rupture conventionnelle pour les fonctionnaires.
Calquée sur le droit privé, elle permet à un agent, s’il obtient l’accord de son administration, de quitter la fonction publique avec une indemnité (entre ¼ et 3/5e de mois de salaire par année d’ancienneté) et la possibilité d’être pris en charge par l’assurance chômage. La rupture conventionnelle est formalisée par écrit après entretien entre les deux parties, et délai de rétractation. Le dispositif est également ouvert aux contractuels en CDI, à titre pérenne et non pas expérimental. À noter que les agents qui réintègrent l’administration moins de six ans après la signature de leur rupture conventionnelle doivent rembourser l’indemnité perçue.
En un an, la rupture conventionnelle n’a pas vraiment pris, selon les premiers échos médiatiques* et syndicaux. En cause : le coût pour les employeurs publics, qui doivent supporter le montant de l’allocation chômage versée au partant, et la réticence à voir partir des compétences en pénurie.
Assouplissement du recours aux contractuels
La loi assouplit également les règles en matière de contrat de travail. Depuis février 2020 existe ainsi un nouveau CDD de droit public, d’une durée comprise entre un et six ans (renouvellements compris), pouvant être conclu dans le cadre d’un projet ou d’une opération identifiée (« contrat de projet »).
Le recours aux contractuels a été également largement ouvert. Il concerne désormais l’ensemble des emplois permanents de la fonction publique d’État, ainsi que les emplois de direction dans les trois versants de la fonction publique. Il a également été élargi aux emplois à temps non complet dans les collectivités territoriale, ou encore aux situations d’accroissement temporaire ou saisonnier de l’activité dans les établissements hospitaliers.
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L’harmonisation du temps de travail |
La loi met fin aux régimes dérogatoires qui existaient encore dans certaines collectivités locales en matière de temps de travail. Désormais, la durée annuelle de 1 607 heures effectives s’applique à tous les agents territoriaux et les régimes plus favorables devront être abrogés. Seules les sujétions particulières (travail de nuit, horaires décalés…) pourront justifier la réduction du temps de travail des agents. Cette mesure doit se mettre en place dans un délai d’un an après le renouvellement des mandats électoraux, au plus tard le 1er janvier 2022. |
Plan d’action pour l’égalité professionnelle
Autre axe de la loi : le renforcement de l’égalité professionnelle. Il s’agit en fait de la transposition de l’accord du 30 novembre 2018 sur l’égalité hommes-femmes dans la fonction publique. En 2020, les employeurs publics ont dû mettre en place un recueil des signalements pour les agents victimes d’un acte de violence, de discrimination, de harcèlement moral ou sexuel ou d’agissements sexistes. Ils ont également dû établir leur premier plan pluriannuel de lutte contre le harcèlement moral et sexuel et de promotion de l’égalité professionnelle. Ce plan doit courir sur trois ans maximum.
Élodie Sarfati
A savoir égal
Agence de digital learning 100 % social-RH
*Article d’Alternatives économiques
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