Même après une agression verbale, un salarié ne peut pas être sanctionné si son comportement est la conséquence du harcèlement qu’il subit.
Certes, la cour de cassation a admis qu’un salarié qui agresse verbalement son supérieur hiérarchique puisse être licencié pour faute grave, c’est-à-dire sans préavis et sans indemnité de licenciement (arrêt du 18 janvier 2011). Mais tout dépend du contexte ayant mené le salarié à ce type de débordement, comme elle l’a rappelé dans un arrêt du 12 mai dernier.
A l’origine, une violente altercation

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Dans cette affaire, un salarié est mis à pied et licencié pour faute grave suite à une violente altercation. L’employeur lui reproche notamment des insultes et des menaces physiques envers sa supérieure hiérarchique.
Le salarié conteste son licenciement. Devant cour d’appel d’Aix-en-Provence, il produit pas moins de 36 attestations louant son professionnalisme, son humeur égale et son caractère courtois. Surtout, il dénonce la surcharge de travail et la pression morale exercée par son employeur. Il fait également valoir la dégradation de son état de santé, qui l’avait conduit à être suivi par un psychiatre, quelques mois avant son licenciement. Le psychiatre a ainsi constaté « des signes en faveur d’un syndrome post-traumatique avec la présence de stress, de pression morale, de conflits professionnels et de céphalées survenues dans ce contexte ».
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Une santé altérée du fait du harcèlement moral
La cour d’appel donne raison au salarié, considérant que son comportement violent avait résulté « de son état pathologique, (…) conséquence du harcèlement moral dont il était victime ». L’employeur ne pouvait donc pas licencier le salarié.
Protection contre le licenciement |
Aucun salarié « ne peut être sanctionné, licencié, ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire (…) pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ».
La même protection s’applique pour un salarié ayant témoigné ou relaté de tels agissements (article L1152-2 du code du travail). Dans les deux cas, le licenciement est nul. |
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L’employeur conteste ce jugement. Estimant que « l’attitude agressive et violente de la part d’un salarié à l’égard de sa hiérarchie constitue une faute grave et ne saurait être justifiée par l’état de santé dégradé ou le mal-être du salarié », il forme un pourvoi auprès de la cour de cassation. Mais cette dernière confirme l’analyse de la cour d’appel : c’est bien le harcèlement moral à l’origine de l’état de santé du salarié, et non l’état de santé lui-même, qui est la cause de l’attitude du salarié. Dès lors, le comportement du salarié ne constitue pas une faute grave « rendant impossible le maintien de l’intéressé dans l’entreprise ».
Cet arrêt s’inscrit dans le droit fil de décisions précédentes, qui ont conduit à l’annulation de licenciements prononcés à l’encontre de salariés victimes de harcèlement moral. Il rappelle l’importance pour l’employeur de prendre toutes les mesures nécessaires pour prévenir le harcèlement moral et d’agir immédiatement pour faire cesser de tels agissements. D’ailleurs, la Haute cour a admis à plusieurs reprises que l’auteur de faits de harcèlement moral puisse être, lui, licencié pour faute grave…
Élodie Sarfati
À savoir égal
Agence de digital learning en social-RH
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